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Le Canada et le Danemark mettent fin à leur « guerre du whisky » dans l’Arctique

Les trois politiciens se serrent la main en souriant sous les applaudissements de nombreux délégués, debout, derrière eux.

Le premier ministre du Groenland, Múte B. Egede (à gauche), le ministre des Affaires étrangères du Danemark, Jeppe Kofod (au centre), et la ministre des Affaires étrangères du Canada, Mélanie Joly (droite), qualifient l'accord pour la création d'une frontière sur l'île Hans de jalon historique.

Photo : La Presse canadienne / Justin Tang

Agence France-Presse

Le Canada et le Danemark ont mis enfin un terme mardi à leur « guerre » larvée de plusieurs décennies, combattue à coups de drapeaux, de whisky et de schnaps sur une île désertique et inhabitée de l'Arctique.

Les deux pays ont formellement signé un accord pour se partager l'île Hans, au large du nord-ouest du Groenland, et créer ainsi la première frontière terrestre entre le Canada et l'Europe, lors d'une cérémonie à Ottawa à laquelle participaient la ministre canadienne des Affaires étrangères et son homologue danois.

Dans une impasse bénigne depuis 49 ans, le conflit se terminera donc par la division en deux de l'île en forme de rein et l'accord entre Ottawa et Copenhague brandi en modèle de résolution des litiges territoriaux à travers le monde.

L'Arctique sert de phare à la coopération internationale, où l'état de droit prévaut, a déclaré la ministre des Affaires étrangères canadienne, Mélanie Joly.

Alors que la sécurité mondiale est menacée, il n'a jamais été aussi important pour les démocraties comme le Canada et le Danemark de travailler ensemble, aux côtés des peuples autochtones, pour résoudre nos différences en accord avec le droit international, a-t-elle ajouté.

L'île Hans vue du ciel, avec l'île d'Ellesmere en arrière-plan,

L’île Hans est un îlot inhabité de 1,3 kilomètre carré situé au centre du canal Kennedy, à égale distance du Groenland et de l’île d’Ellesmere, au Canada.

Photo : Wikipedia / Toubletap

Lors d'une conférence de presse avec le ministre danois des Affaires étrangères, Jeppe Kofod, Mélanie Joly a souligné que le conflit, que beaucoup ont surnommé la guerre du whisky , était la plus amicale de toutes les guerres.

Jeppe Kofod a déclaré de son côté que la résolution du conflit intervenait au moment où l'ordre international fondé sur le droit se trouve sous pression et que les valeurs démocratiques sont attaquées, en référence à la guerre en Ukraine.

Par contraste, nous avons démontré de quelle façon des différends de longue date peuvent être résolus pacifiquement en suivant les règles, a-t-il déclaré, ajoutant qu'il espérait inspirer d'autres pays à suivre la même voie.

L'île Hans, d'une superficie de 1,3 km carré, est située entre l'île d'Ellesmere dans le nord du Canada, et le Groenland, territoire danois. Le différend remonte à 1973, quand une frontière maritime a été tracée entre les deux pays.

Carte géographique montrant l'emplacement de l'île.

L'île Tartupaluk, ou Hans, est un rocher inhabité situé dans le détroit de Nares, entre le Groenland et le Canada.

Photo : Radio-Canada

Les Danois et les Canadiens se sont rendus à tour de rôle par hélicoptère sur l'île pour revendiquer le territoire, ce qui a mené à des protestations diplomatiques, à des campagnes en ligne, et même à des appels au Canada à boycotter les viennoiseries danoises.

Au cours de ces visites, chaque camp plantait un drapeau et laissait derrière lui une bouteille de whisky ou de schnapps à destination de l'autre partie.

Alors qu'ils échangeaient des bouteilles mardi, Mélanie Joly et Jeppe Kofod se sont amusés à l'idée que le Canada pourrait rejoindre l'Union européenne à présent que les deux entités partageaient une frontière terrestre.

Six marins danois et leur capitaine posent avec le drapeau du Danemark hissé au sommet d'un mât, près de la mer, sur un sol rocailleux.

L'équipage du vaisseau danois Vedderen tient une cérémonie de levée du drapeau sur l'île inhabitée Hans, au large du Groenland, le 13 août 2002.

Photo : La Presse canadienne/AP Photo / Polfoto, Vedderen

Couverte de neige, l'île Hans est inhabitable, mais les effets du changement climatique amènent toujours plus de circulation maritime dans l'Arctique et l'ouvrent à davantage d'exploitation de ses ressources, notamment halieutiques.

Selon l'expert de l'Arctique Michael Byers, l'île est cependant si extraordinairement éloignée qu'il n'est pas rentable d'y envisager toute activité sérieuse.

Repousser sine die toute résolution à ce conflit inhabituel a longtemps représenté une bonne occasion de faire des effets de manche politiques pour chacune des parties, notamment avant des élections.

C'était un différend de souveraineté entièrement dépourvu de risques, entre deux alliés de l'OTAN, autour d'une île minuscule et sans importance, explique ainsi Michael Byers à l'AFP.

Le Danemark craignait également que le fait de perdre cette bataille à propos de l'île Hans saperait ses relations avec le Groenland, tandis que le Canada s'inquiétait qu'une défaite affaiblisse ses positions de négociation avec les États-Unis dans un différend cette fois-ci bien plus conséquent, en mer de Beaufort, réputée comme étant riche en hydrocarbures.

Le premier ministre Justin Trudeau n'a pas fait de la souveraineté de l'Arctique une composante de son identité politique, selon Michael Byers, ce qui a permis de réduire la température, au moins du côté canadien.

Mais, de manière plus importante, la Russie a envahi l'Ukraine, et cela a créé le moment opportun pour dire au monde que les pays responsables s'entendaient sur leurs conflits territoriaux de manière pacifique, ajoute-t-il.

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